miércoles, 1 de enero de 2020

_- Jacques Prevert, Cet amour. Este amor

_- Cet amour

Cet amour
Si violent
Si fragile
Si tendre
Si désespéré
Cet amour
Beau comme le jour
Et mauvais comme le temps
Quand le temps est mauvais
Cet amour si vrai
Cet amour si beau
Si heureux
Si joyeux
Et si dérisoire
Tremblant de peur comme un enfant dans le noir
Et si sûr de lui
Comme un homme tranquille au milieu de la nuit
Cet amour qui faisait peur aux autres
Qui les faisait parler
Qui les faisait blêmir
Cet amour guetté
Parce que nous le guettions
Traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Parce que nous l’avons traqué blessé piétiné achevé nié oublié
Cet amour tout entier
Si vivant encore
Et tout ensoleillé
C’est le tien
C’est le mien
Celui qui a été
Cette chose toujours nouvelle
Et qui n’a pas changé
Aussi vrai qu’une plante
Aussi tremblante qu’un oiseau
Aussi chaude aussi vivant que l’été
Nous pouvons tous les deux
Aller et revenir
Nous pouvons oublier
Et puis nous rendormir
Nous réveiller souffrir vieillir
Nous endormir encore
Rêver à la mort,
Nous éveiller sourire et rire
Et rajeunir
Notre amour reste là
Têtu comme une bourrique
Vivant comme le désir
Cruel comme la mémoire
Bête comme les regrets
Tendre comme le souvenir
Froid comme le marbre
Beau comme le jour
Fragile comme un enfant
Il nous regarde en souriant
Et il nous parle sans rien dire
Et moi je l’écoute en tremblant
Et je crie
Je crie pour toi
Je crie pour moi
Je te supplie
Pour toi pour moi et pour tous ceux qui s’aiment
Et qui se sont aimés
Oui je lui crie
Pour toi pour moi et pour tous les autres
Que je ne connais pas
Reste là
Lá où tu es
Lá où tu étais autrefois
Reste là
Ne bouge pas
Ne t’en va pas
Nous qui nous sommes aimés
Nous t’avons oublié
Toi ne nous oublie pas
Nous n’avions que toi sur la terre
Ne nous laisse pas devenir froids
Beaucoup plus loin toujours
Et n’importe où
Donne-nous signe de vie
Beaucoup plus tard au coin d’un bois
Dans la forêt de la mémoire
Surgis soudain
Tends-nous la main
Et sauve-nous.

https://genius.com/artists/Jacques-prevert

Este amor

Este amor
Tan violento
Tan frágil
Tan tierno
Tan desesperado
Este amor
Hermoso como el día
Y malo como el tiempo
Cuando hace mal tiempo
Este verdadero amor
Este hermoso amor
Tan feliz
Muy contento
Y tan risueño
Temblando de miedo
como un niño en la oscuridad
Y tan seguro de sí mismo
Como un hombre tranquilo en medio de la noche
Este amor que asustó a otros
Que los hizo hablar
Que los hizo palidecer
Este amor visto
Porque estábamos viendo
Golpeado herido pisoteado acabado negado olvidado
Porque golpeado heridos pisoteados acabado negado olvidado
Todo este amor
Tan vivo todavía
Y todo soleado
Es el tuyo
Es el mio
Que fue
Esta siempre nueva cosa
Y que no ha cambiado
Tan cierto como una planta
Tembloroso como un pájaro
Tan cálido
tan vivo como el verano
Ambos podemos ir y volver
Podemos olvidar
Y luego volvemos a dormir
Despertar sufrir envejecer
quedarnos dormidos de nuevo
Soñar con la muerte
Despertarnos sonreir y reir
Y rejuvenecer
Nuestro amor sigue ahí
Terco como un borrico
Vivo como el deseo
Cruel como la memoria
Bestia como el arrepentimiento
Tierno como el recuerdo
Frío como el mármol
Hermoso como el día
Frágil como un niño
Nos mira sonriendo
Y nos habla sin decir nada.
Y lo escucho temblar
Y lloro por ti
Lloro por mi
Te suplico
Por ti por mí y por todos los que se aman
Y que se han amado
Sí, le grito
Por ti por mí y por todos los demás
Que no conozco
Quédate ahí
Donde estas
Donde estuviste una vez
Quédate ahí
No te muevas
No te vayas
Los que nos amamos
Te hemos olvidado
Tu no nos olvides
Solo te tenemos a ti en la tierra
No nos dejes enfriar
Mucho más aún
Y en cualquier lugar
Danos una señal de vida
Mucho después en la esquina de un bosque.
En el jardín de la memoria
De pronto
Extiende tu mano
Y sálvanos.

Soyez prévenus vieillards soyez prévenus chefs de famille le temps où vous donniez vos fils à la patrie comme on donne du pain aux pigeons ce temps-là ne reviendra plus prenez-en votre parti c'est fini le temps des cerises ne reviendra plus et le temps des noyaux non plus inutile de gémir allez plutôt dormir vous tombez de sommeil votre suaire est fraîchement repassé le marchand de sable va passer préparez vos mentonnières fermez vos paupières le marchand de gadoue va vous emporter c'est fini les trois mousquetaires voici le temps des égoutiers Lorsque avec un bon sourire dans le métropolitain poliment vous nous demandiez deux points ouvrez les guillemets descendez-vous à la prochaine jeune homme c'est de la guerre dont vous parliez mais vous ne nous ferez plus le coup du père Français non mon capitaine non monsieur un tel non papa non maman nous ne descendrons pas à la prochaine ou nous vous descendrons avant on vous foutra par la portière c'est plus pratique que le cimetière c'est plus gai plus vite fait c'est moins cher Quand vous tiriez à la courte paille c'était toujours le mousse qu'on bouffait mais le temps des joyeux naufrages est passé lorsque les amiraux tomberont à la mer ne comptez pas sur nous pour leur jeter la bouée à moins qu'elle ne soit en pierre ou en fer à repasser il faut en prendre votre parti le temps des vieux vieillards est fini Lorsque vous reveniez de la revue avec vos enfants sur vos épaules vous étiez saouls sans avoir rien bu et votre moelle épinière faisait la folle et la fière devant la caserne de la Pépinière vous travailliez de la crinière quand passaient les beaux cuirassiers et la musique militaire vous chatouillait de la tête aux pieds vous chatouillait et les enfants que vous portiez sur vos épaules vous les avez laissés glisser dans la boue tricolore dans la glaise des morts et vos épaules se sont voûtées il faut bien que jeunesse se passe vous l'avez laissée trépasser Hommes honorables et très estimés dans votre quartier vous vous rencontrez vous vous congratulez vous vous coagulez hélas hélas cher Monsieur Babylas j'avais trois fils et je les ai donnés à la patrie hélas hélas cher Monsieur de mes deux moi je n'en ai donné que deux on fait ce qu'on peut ce que c'est que de nous... avez-vous toujours mal aux genoux et la larme à l'oil la fausse morve de deuil le crêpe au chapeau les pieds bien au chaud les couronnes mortuaires et l'ail dans le gigot vous souvenez-vous de l'avant-guerre les cuillères à absinthe les omnibus à chevaux les épingles à cheveux les retraites aux flambeaux ah que c'était beau c'était le bon temps Bouclez-la vieillards cessez de remuer votre langue morte entre vos dents de faux ivoire le temps des omnibus à cheveux le temps des épingles à chevaux ce temps-là ne reviendra plus à droite par quatre rassemblez vos vieux os le panier à salade le corbillard des riches est avancé fils de saint Louis montez au ciel la séance est terminée tout ce joli monde se retrouvera là-haut près du bon dieu des flics dans la cour du grand dépôt En arrière grand-père en arrière père et mère en arrière grands-pères en arrière vieux militaires en arrière les vieux aumôniers en arrière les vieilles aumônières la séance est terminée maintenant pour les enfants le spectacle va commencer. Estén atentos, ancianos Estén atentos, cabezas de familia El tiempo en que entregaron a sus hijos a la patria como se da pan a las palomas Ese tiempo nunca volverá Acéptenlo Se acabó El tiempo de las cerezas nunca volverá Y tampoco el tiempo de los huesos No sirve de nada lamentarse Duérmanse mejor Se están quedando dormidos Su mortaja está recién planchada Viene el hombre de arena Preparen sus barbijos Cierren los párpados El comerciante de barro está a punto de llevarlos Los tres mosqueteros han terminado Este es el tiempo de los trabajadores de las alcantarillas Cuando, con una amable sonrisa en el metro, nos pediste cortésmente dos puntos Bájese en la siguiente parada Joven Estabas hablando de la guerra Pero no nos dijiste que no volverás a usar el viejo truco del "padre" Francés No, Capitán No, Sr. Fulano No, papá No, mamá No nos bajaremos en la próxima parada O te bajaremos antes Te echaremos por la puerta Es más práctico que el cementerio Es más divertido Más rápido Es más barato Cuando se echaba a suertes Siempre era el grumete el que se comía Pero se acabó la época de los naufragios alegres Cuando los almirantes caen por la borda No cuentes con que les lancemos un salvavidas A menos que sea de piedra O de hierro Tienes que aceptarlo Se acabó la época de los viejos Cuando volvías de la revista Con tus hijos a hombros Estabas borracho sin haber bebido nada Y tu médula espinal se comportaba como un loco y orgulloso frente al cuartel La guardería Trabajabas con tu melena cuando pasaban los apuestos coraceros y los militares Música te hacía cosquillas de pies a cabeza te hacía cosquillas y a los niños que cargabas sobre tus hombros los dejabas resbalar en el lodo tricolor en la arcilla de los muertos y tus hombros se encorvaron la juventud debe tener su aventura la dejaste morir Hombres honorables y muy estimados en tu barrio te encuentras te felicitas te coagulaste Ay, ay, querido Señor Babylas Tuve tres hijos y los di a la patria Ay, ay, querido Señor de mis dos Solo di dos uno hace lo que puede ¿Cómo será para nosotros...? ¿Aún te duelen las rodillas y una lágrima en el ojo? el moco falso del luto el crespón en el sombrero pies calentitos coronas funerarias y ajo en la pierna de cordero ¿Recuerdas la preguerra? Días Cucharas de absenta, ómnibuses tirados por caballos Horquillas Procesiones con antorchas Ah, qué bonito era Qué buenos tiempos aquellos Cállense, viejos Dejen de retorcer su lengua muerta entre sus dientes falsos de marfil El tiempo de los ómnibuses tirados por caballos El tiempo de las horquillas Esos días nunca volverán Cuatro a la derecha Reúnan sus viejos huesos El furgón policial Ha llegado el coche fúnebre del hombre rico Hijo de San Luis, asciende al cielo La sesión ha terminado Toda esta buena gente se reunirá allí cerca del buen dios de los policías en el patio del gran Depósito Bisabuelo, bisabuela, bisabuelos, bisabuelos, bisabuelas, bisabuelas, la sesión ha terminado, ahora para los niños comenzará el espectáculo.

No hay comentarios: